On parle gros sous avec Michaël Zemmour ! Le chercheur et économiste nous raconte comment les politiques budgétaires menées sous Emmanuel Macron ont profité aux ultra-riches, érodé l’État social, mis la France dans le rouge... pour mieux justifier de nouvelles coupes budgétaires ! Comment sortir de ce cycle infernal ?
Les élites américaines de la première heure ont rédigé la Constitution pour mettre un frein aux soulèvements démocratiques qui menaçaient le pouvoir de la classe dirigeante. La Déclaration des droits, ajoutée tardivement à la Constitution pour protéger des libertés majeures, était une concession à ces luttes populaires.
Le plus souvent, lorsque nous tentons de déchiffrer la fascisation en cours, nous convoquons le passé : qu’est-ce que le fascisme ? Qu’était le fascisme ? Quels sont les signes que nous décelons dans le présent qui pourraient nous permettre de prévoir une re-dite historique ? Si ce travail est aussi précieux que nécessaire, il peut néanmoins charrier son lot de biais et d’impensés. Le grand mérite du ticket Trump/Musk est de nous obliger à penser le fascisme depuis le futur, c’est-à-dire depuis ce que les évolutions socio-techniques permettent d’innovations et d’hybridations politiques comme subjectives du point de vue de la domination. Pour le dire plus simplement, se battre contre le présent implique d’examiner le passé tout en se donnant les moyens d’anticiper l’avenir. Ces quelques postulats quant à la guerre perpétuelle de Frédéric Neyrat, tentent précisément cela et se liront comme une continuation par d’autres moyens de l’article de Norman Ajari dans nos pages la semaine dernière.
De nouvelles révélations publiées le 4 février par Le Monde et la cellule investigation de Radio France montrent l’ampleur de l’affaire : le plus haut sommet de l’État, jusqu’au cabinet d’Emmanuel Macron, a aidé en toute connaissance de cause Nestlé à filtrer illégalement son eau en bouteille.
De quoi compléter les enquêtes journalistiques publiées en 2024 par Le Monde et Radio France puis par Mediapart, selon lesquelles le groupe Nestlé avait fraudé pendant quinze ans, vendant de l’eau en bouteille non conforme.
Notes ministérielles, échanges de courriels, résultats de prélèvements sanitaires, compte-rendus d’inspection des usines de la multinationale… Des dizaines de documents attestent que « l’exécutif a privilégié les intérêts de Nestlé au détriment des consommateurs en laissant le groupe suisse continuer à commercialiser une eau qu’il savait non seulement non conforme à la réglementation mais aussi à risque pour la santé », souligne Le Monde.
Noam Chomsky est le critique de l’empire américain le plus célèbre au monde. Aucun intellectuel vivant ne peut rivaliser. Même John Mearsheimer, le théoricien des relations internationales bien connu pour ses critiques des relations étrangères des États-Unis, ne lui arrive pas à la cheville : une recherche Google Ngram révèle rapidement le nombre de fois où le nom de Chomsky apparaît dans des textes en anglais, par rapport à celui de Mearsheimer. Et Chomsky n’est pas seulement l’un des écrivains les plus cités sur le thème des relations extérieures des États-Unis. Il est également un des rares érudits à être passé du monde universitaire à la culture populaire. Son nom apparaît dans des chansons du groupe punk NOFX (« And now I can’t sleep from years of apathy / All because I read a little Noam Chomsky ») et de l’humoriste Bo Burnham (« My show is a little bit silly / And a little bit pretentious / Like Shakespeare’s willy / Or Noam Chomsky wearing a strap-on »). Le psychologue interprété par Robin Williams dans Good Will Hunting fait référence à Chomsky pour démontrer sa bonne foi intellectuelle auprès de Will lui-même. Et dans la série télévisée Community, mon personnage préféré Britta – une poseuse gauchiste ennuyeuse dont le titre de gloire est d’avoir « vécu à New York » – a un chat qui s’appelle Chomsky. S’il est un critique de l’empire américain que les Américains ordinaires connaissent, c’est sans aucun doute Chomsky. Retour sur sa critique de l’Empire étasunien.
Trump a décrété que le golfe du Mexique serait désormais nommé « golfe de l’Amérique ». Une décision solitaire qui signe « un changement de paradigme ostensible et très inquiétant » pour l’historienne Nepthys Zwer.
Dès le jour de son investiture comme président des États-Unis, le 20 janvier, Donald Trump a signé un décret visant à renommer le golfe du Mexique en « golfe de l’Amérique ». Le mont Denali, plus haut sommet étasunien nommé ainsi par la population autochtone des Athabaskans, en Alaska, a été dans le même décret rebaptisé en « mont McKinley », nom qu’il avait déjà porté de 1896 à 2015, en hommage au 25ᵉ président des États-Unis.
Pour Reporterre, l’historienne Nepthys Zwer explique le sens de tels symboles géographiques, et l’importance du pouvoir de dessiner les cartes dans l’histoire coloniale et anti-écologique de l’Occident. Elle est notamment l’autrice de Pour un spatio-féminisme. De l’espace à la carte (La Découverte, 2024) et co-autrice de Cartographie radicale (La Découverte, 2022).
Suite à l'élection de Donald Trump, Elon Musk a pris les rênes de son fameux service de « l’efficacité gouvernementale » nommé DOGE. Le milliardaire utilise ce statut pour mettre la main sur les systèmes informatiques de différentes agences, comme celui des ressources humaines des employés fédéraux américains. Le nouveau gouvernement a continué la purge des sites internet des agences gouvernementales. Des données sur le VIH sont supprimées et une agence de santé a demandé à des chercheurs de rétracter certains articles scientifiques.
Chère Caroline Yadan,
Le 28 janvier, lors de la séance de questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, vous avez cru bon de prendre en otage les commémorations du 80e anniversaire de la libération du camp d’Auschwitz pour établir un parallèle entre l’extermination des Juifs d’Europe par les nazis et les attaques meurtrières du 7 octobre 2023 en Israël, tout simplement, avant de mener une violente charge contre les députés de La France insoumise en affirmant que « la haine du Juif est [aujourd’hui] exaltée par un dangereux parti à l’extrême gauche de cet hémicycle », rien que ça, le tout — bien évidemment — sous les applaudissements nourris des députés du Rassemblement national, félicitations.
Venu des États-Unis, un groupe de réflexion d’extrême droite et climatosceptique œuvre à démanteler les lois environnementales de l’Europe. Et ce, avec l’aide de députés européens.
Il en faut peu, aux médias toutes lignes éditoriales confondues, pour faire d'un politique une nouvelle coqueluche médiatique : prenez un homme, de droite, plus de 50 ans, blanc, au discours martial sur la sécurité et l'immigration et c'est plié. Il suffit qu'il répète les mêmes éléments de langage et le voilà propulsé sur tous les plateaux télés. A 64 ans, Bruno Retailleau, l'ancien sénateur de Vendée, fils politique de Philippe de Villiers, a trouvé sa voie politique et médiatique. Omniprésent comme l'était Nicolas Sarkozy, à la droite extrême, il bénéficie d'un traitement médiatique très favorable. Pourquoi ? D'où tire-t-il sa légitimité politique ? Comment les médias accompagnent son ascension politique ?
La question est sur toutes les lèvres : François Bayrou risque-t-il le même sort que Michel Barnier, à savoir la censure ? Le PS qui avait initialement refusé de voter la censure de LFI, a depuis hier mis en garde le premier ministre : soit il retire ses propos sur la submersion de l’immigration soit il ne négocie plus avec le gouvernement …
Autre sortie qui a fait parler d’elle, celle du milliardaire Bernard Arnault. Le PDG de LVMH a dénoncé la hausse des impôts sur les bénéfices des grandes entreprises prévue dans le budget, qu’il a qualifié de « taxation du “made in France” » qui « pousse à la délocalisation »… Ça nous a fait réagir bien évidemment !
Elon Musk qui commet un salut hitlérien le jour de l’investiture de Donald Trump… à quelques jours d’un nouvel anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par l’armée de Vladimir Poutine…
2025 a à peine enterré Jean-Marie Le Pen, que le danger pour les démocraties menace, avec parfois des visages nouveaux. Une « Internationale réactionnaire », selon la formule d’Emmanuel Macron, s’apprête-t-elle à redéfinir le prochain quart de siècle ?
Ou, si on préfère citer Gramsci : sommes-nous désormais entrés de plein pied dans ce moment de bascule où « le vieux monde se meurt, le nouveau monde tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres» ?
Pour en discuter, Extrêmorama reçoit trois historiens soucieux de mettre le moment présent en perspective : Sylvie Laurent, américaniste, bien connue de nos services pour ses travaux des questions sociales et raciales aux États-Unis ; Adrien Nonjon, historien des extrêmes droites de Russie et d’Ukraine ; Grégoire Kauffmann, fin connaisseur des extrêmes droites françaises.
Avec nous, également, deux journalistes au travail exceptionnel sur l’extrême droite : Marine Turchi de Mediapart et Christophe-Cécil Garnier, rédacteur en chef adjoint au pôle enquête de StreetPress.
Deux heures en direct, sur Mediapart et Au Poste
Le fascisme est là. Avec la panique, une certaine confusion règne et la question de ce qui est fasciste ou pas se pose de manière récurrente. Par quels critères faut-il définir le fascisme ? C’est à cette question que l’historien Paxton répond, dans un ouvrage magistral : Le fascisme en action. À l’aune de cette lecture, jetons un œil aux premiers décrets présidentiels de Donald Trump.
Le 20 janvier 2025, lors de la cérémonie d’investiture de Donald Trump à la présidence des États-Unis, le multimilliardaire Elon Musk a sidéré le monde en ponctuant son discours décousu et hébété de deux saluts fascistes pleins de franchise et de détermination. Musk n’est pas seulement un homme d’affaires et un politicien : il travaille activement à devenir une figure de la culture populaire, un personnage, voire une icône. Ce sieg heil survient après des mois de tentatives peu subtiles de séduire les gamers aussi bien que les jeunes néofascistes de l’alt-right. Quelle est la signification culturelle et historique de son geste ?
D’autres milliardaires, comme le CEO de Meta Mark Zuckerberg, sont des convertis récents du trumpisme. Sa profession de foi anti-woke et son apologie de la masculinité traditionnelle au micro du podcasteur conservateur Joe Rogan dans le sillage de la victoire électorale du candidat républicain ressemble davantage à une opération opportuniste qu’à un chemin de conversion. Musk aussi bien que Zuckerberg sont des démocrates d’hier. Mais là où ce dernier virera probablement encore sa cuti aussitôt que le vent électoral tournera, Elon est parti trop vite et trop loin pour espérer un jour faire machine arrière sans dommages. Non seulement il a fait don de fortes sommes à des organisations d’extrême-droite européennes comme l’AFD allemande ou Reform UK au Royaume-Uni, mais il apporte régulièrement son soutien à des figures plus radicales, en faisant par exemple du hooligan britannique Tommy Robinson l’un de ses protégés. Il est donc incontestable que les convictions politiques de l’auteur de ce salut ne sont pas incompatibles avec un programme fasciste, puisqu’il soutient activement, financièrement et médiatiquement, des mouvements d’extrême-droite sans concession à travers tout l’occident.
Le syndicat agricole Coordination rurale affirme être apolitique. Pourtant, sur le terrain, nombreux sont les représentants de ce syndicat qui affichent ouvertement leur proximité idéologique avec l'extrême droite.
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« C’est un énorme plaisir de voir votre jeunesse, ça me fait chaud au cœur. » La vice-présidente de la Coordination rurale, Sophie Lenaerts, participe à une université d’été, le 23 août dernier. Mais pas n’importe laquelle. Elle est organisée par l’Action française, un mouvement politique d’extrême droite, nationaliste et royaliste.
Reconnaissance faciale en temps réel, interprétation des émotions, catégorisation des pensées religieuses, sexuelles et politiques… La France a activement milité pour que ces pratiques soient permises par « l’AI Act », le règlement européen sur l’intelligence artificielle, révèlent Disclose et Investigate Europe, documents confidentiels à l’appui.
Imaginez que vous participiez à une manifestation pour le climat, que vous portiez un badge ou que vous brandissiez une pancarte. Une caméra « intelligente » détecte ces signes, enregistre votre visage et transmet les images à la police pour les comparer au fichier des personnes recherchées pour crimes environnementaux. Vous n’y figurez pas, mais les données restent stockées. Imaginez un naufragé qui vient de débarquer sur l’île de Lampedusa. Arrêté, il est interrogé à l’aide d’une caméra capable de détecter des émotions. Le système enregistre des signes de nervosité, de peur, d’indécision : il en conclut que l’exilé ment sur son âge ou ses origines. Sa demande d’asile est rejetée.
Ces scènes qui semblent sorties d’un film de science-fiction pourraient devenir réalité dans les prochaines semaines. Le 2 février, les articles les plus controversés — dits « risques inacceptables » — du règlement européen sur l’intelligence artificielle (IA) entreront en vigueur avec, dans leur sillage, une myriade de portes ouvertes pour contrôler l’espace public. Le texte était pourtant censé encadrer l’usage de l’intelligence artificielle contre les menaces pour les droits fondamentaux et les libertés publiques en Europe. Mais après deux ans de négociations secrètes entre les États européens, ce cadre n’a pas survécu aux coups de boutoir de la France, qui a obtenu des exemptions majeures en imposant le thème de « la sécurité nationale ».
C’est ce que démontre l’analyse d’une centaine de documents confidentiels européens sur l’AI Act, obtenus par Disclose et Investigate Europ. Des comptes-rendus de négociations qui dévoilent comment Paris est parvenu à ouvrir une brèche pour autoriser la surveillance de masse dans l’espace public.
Alors que se déroulent jusqu’au 30 janvier les élections dans les chambres d’agriculture, qui désignent les représentants du monde agricole et paysan dans ces instances, Contretemps republie ici un dossier de Campagnes solidaires (n°405 – mai 2024), le mensuel de la Confédération paysanne à propos de l’extrême droite dans le monde agricole.
Il comprend plusieurs articles permettant de revenir sur l’histoire internationaliste de la confédération paysanne (Fanny Métrat), la manière dont le monde paysan a été confronté aux « chemises vertes », un mouvement fascisant dans les années 1930 (Gaël Blanc) ou encore la manière dont « l’extrême droite gagne du terrain dans le monde agricole » (Sophie Chapelle).
Plusieurs articles sont consacrés à différentes régions en particulier : du Midi à l’Ouest, c’est la manière dont l’extrême droite s’affiche auprès des agriculteur·ices en colère ou met en œuvre des actions ponctuelles. Sophie Chapelle rappelle ensuite à quel point les propositions du RN s’inscrivent dans une logique productiviste à rebours du projet de l’agriculture paysanne. Finalement, les derniers articles du dossier reviennent sur les contours du projet de la confédération paysanne (Stéphane Galais), et son implication aux côtés des travailleuses et des travailleurs saisonniers migrants (Sophie Chapelle).
Tandis que la Coordination rurale est mise en avant par les médias comme une interlocutrice privilégiée, nous publions ce dossier pour rendre compte de ces accointances avec l’extrême droite, que des initiatives récentes ont encore révélé ; par exemple, dans le Tarn-et-Garonne, la Coordination rurale a fait venir Eric Zemmour pour une réunion publique le 15 novembre 2024 et a bénéficié d’une large couverture médiatique, notamment de Cnews ; ou encore, la vice-présidente de la Coordination rurale (Sophie Lenarts) a participé à l’université de l’Action Française à la fin du mois d’août.
Ce ne sont que quelques exemples récents, qui révèlent une imprégnation profonde et des relais de l’extrême droite dans des fractions de plus en plus visibles du syndicalisme agricole.