Les mots en politique ont-ils perdu tout lien avec le réel ? La très courte et intense campagne législative en cours pose légitimement la question, tant les outrances semblent y avoir atteint un degré inédit, déformant profondément le débat public. La France insoumise (LFI), parti de gauche réformiste classique, fut quasi-systématiquement présentée ces dernières semaines comme « l’extrême gauche », non seulement par ses adversaires politiques mais aussi par une grande partie des médias.
Dans un retournement sémantique orwellien, au moment même où l’extrême droite menace d’accéder au pouvoir en France, c’est LFI, et tout le Nouveau Front populaire avec elle, qui est présenté comme sortant de « l’arc républicain » et qualifié de « plus grand parti antisémite de France », au détriment de toute rationalité. Plusieurs prises de position critiquables de responsables LFI sont mises en avant pour justifier l’anathème général, dans une démesure qui occulte un programme commun pourtant engagé clairement sur le sujet et un fondement idéologique dénué de tout antisémitisme.