La diffusion du rapport parlementaire sur « l’entrisme islamiste » en France et l’influence supposée des Frères musulmans marque une étape supplémentaire dans le développement de discours et d’actes visant la communauté musulmane dans notre pays. Outre de nombreuses fragilités méthodologiques, ce rapport témoigne plus généralement d’une approche complotiste qui présente des parallèles évidents avec la rhétorique antisémite du début du XXème siècle.
Au pays de la déclaration des Droits de l’Homme, les effluves racistes continuent de se diffuser sur tout le territoire. D’ouest en est.
La salle de karaté de La Rochefoucauld, bourgade charentaise de 3000 habitants seulement, a ainsi été recouverte d'inscriptions nazies le week-end du 23 et 24 mai. C'est un employé des services techniques de la ville qui a découvert les inscriptions.
Y figurent notamment « SS », « 88 » (pour Heil Hitler, H étant la 8ème lettre de lalphabet), une croix celtique, et «1161» pour "anti antifa ". Etait également tagué, « GUD», pour Groupe union défense, l’organisation emblématique de cogneurs néofasciste et toujours influente malgré sa diollution l’an dernier. Son principal chef de file, Marc de Cacqueray-Valménier, s’est recyclé comme gardien de l'île privée de Vincent Bolloré dans le Finistère.
En Moselle, sur le commune de l'Hôpital, un local servant de lieu de rencontre à la communauté musulmane a été saccagé et recouvert de tags nazis ce même week end des 24-25 mai. Des corans ont été renversés et souillés d'urine, des pneus, bouteilles de gaz et produits inflammables ont été retrouvés sur place. Une croix gammée a été taguée sur la façade.
A Lorient, début mars, des individus avaient été aperçus efcetuant de nuit des saluts nazis, et des tags à la gloire du Troisième Reich avaient été retrouvés près de l'Université, comme l'avait relaté Blast.
Après la diagonale du vide, voici venir la diagonale raciste.
Des inspecteurs généraux - chargés de l'enquête menée en 2023 sur le collège parisien Stanislas, un établissement catholique privé sous contrat - ont pointé ce mercredi 21 mai le rôle de Caroline Pascal, l'ex-cheffe de l'Inspection générale et actuelle numéro deux du ministère de l'Education nationale, devant la commission d'enquête sur "le contrôle par l’Etat des violences dans les établissements scolaires". En cause : l'ajout d'un paragraphe à la lettre de conclusion de la mission.
C'est cette presse à l'époque qui a jeté Dreyfus aux chiens, c'est cette presse là qui a donné des idées à celui qui a tué Zola, qui a essayé de tuer Blum, à celui qui a réussi à tuer Jaurès. On est face à un test, soit on se réveille maintenant, soit on attend la cata. Mais vraiment ils méritent d'être traités différemment des autres ceux là.
Les propos tenus par Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, sur le plateau de CNews, évoquant le “racisme anti-blanc”, marquent une dérive politique grave et inacceptable. Cette notion, forgée et popularisée par l’extrême droite, inverse les rapports de domination et banalise les vrais mécanismes du racisme. Elle laisse croire que toutes les formes de “discrimination” se valent, alors que le racisme structurel repose sur l’histoire coloniale, l’exploitation économique, et l’assignation à l’altérité.
Dans leur rôle de cadrage des problèmes publics, les identitaires associent un langage propre à chacune de leurs actions : « Français de souche », « racisme antiblancs », « francocide » ou encore « grand remplacement ». Ces mots constituent un moyen pour eux de fabriquer des raccourcis interprétatifs. Les musulmans sont notamment associés à l’insécurité (ils sont assimilés à des « racailles ») en même temps qu’à des mauvais pauvres (ils viendraient bénéficier des aides sociales). Surtout, les immigrés sont rendus responsables de leur sort, puisque leur comportement serait imputable à leur essence (leur culture, leur religion, leur personnalité) plutôt qu’à des logiques sociales, collectives et structurales. De cette façon, les actions médiatiques des identitaires opèrent un acte de minoration des populations musulmanes, qui sont construites comme des altérités radicales, infériorisées par rapport à la population majoritaire. En relayant ces actions, les médias participent à la diffusion de ces chaînes de causalité et à la construction de la stigmatisation des populations musulmanes, dans un contexte où celles-ci sont invisibilisées dans l’espace public, en particulier les femmes, plus encore lorsqu’elles portent le voile.
« Compte tenu des tensions actuelles », France Télévision a décidé de déprogrammer un documentaire sur l’utilisation d’armes chimiques par l’armée française durant la guerre d’Algérie. Quelques jours après la mise à pied du journaliste Jean-Michel Aphatie pour avoir comparé les crimes coloniaux français à ceux de l’armée allemande dans la France occupée, cette «déprogrammation» montre à quel point la cancel culture de droite et d’extrême droite impose sa loi en France.
Pour le procureur de la République de Nanterre, « pourriture d’arabe dégage au bled sale merde » n’est pas assez caractérisé. Ma plainte a été classée sans suite, en deux semaines. Si vous voulez tenir ce genre de propos, allez-y, vous ne risquez rien !
Ça a commencé comme ça, très simplement. Je publie un commentaire sur la page Facebook de ma ville – Clichy-la-Garenne – un autre Clichois m’apostrophe : « Si tu n’es pas content, tu quittes Clichy. » Les Arabes en France n’ont pas droit à la critique. On ne leur laisse que deux choix : obéir aux injonctions, ou dégager. En enquêtant sur cet individu, j’apprends qu’il est connu de toute la ville et qu’il est proche du maire. On me renseigne sur son activité et je décide de laisser un avis Google sur la page de son entreprise afin de dénoncer l’injonction raciste. Les avis des autres internautes et les témoignages des Clichois·es pleuvent alors. Unanimes sur ses pratiques : harcèlement, intimidation, menaces, injures, etc.
Non content de ce premier forfait et en guise de représailles, probablement galvanisé par le score du Rassemblement national, cette même personne m’envoie, le soir des élections européennes, un message privé sur Messenger comprenant une photo de Jordan Bardella heureux du résultat que son parti vient de réaliser et un mot : « pourriture d’arabe dégage au bled sale merde ».
Les images de CRS passifs et semblant protéger des néo-fascistes armés et masqués aux prises avec des manifestants ont semé le trouble : des policiers d'extrême droite seraient-ils en train de se lâcher avec la possibilité que leur camp accède au pouvoir ? Certains, dans les forces de l'ordre, dénoncent la prégnance d'idées racistes et xénophobes. Le plus souvent sous couvert d’anonymat : les lanceurs d'alerte sont ostracisés et subissent des pressions.
« Parce qu’ils croient entendre des messages divins, leurs oreilles restent sourdes à toute parole d’humanité ».
Ce sont les mots de Stefan Zweig, immense intellectuel, écrivain juif et autrichien, qui a dû fuir l’Europe et la barbarie nazie dans les années 1930. Il s’est suicidé en 1942 au Brésil, durant la deuxième guerre mondiale, ne supportant plus la folie meurtrière qui embrasait son continent d’origine. Ses mots puissants résonnent avec force, alors qu’un génocide est en cours, justifié au nom de la foi religieuse. Ils pourraient précisément s’appliquer à l’armée et au gouvernement israéliens. Stefan Zweig pouvait-il imaginer que le fascisme et les pulsions de mort justifiées par la religion pourraient ressurgir de la même manière près d’un siècle après sa mort ?
Y a-t-il quelqu'un à la barre de France Inter ? Hier, le 2 mai, la radio du service public a sombré deux fois.
D'abord, en décidant de suspendre l'humoriste Guillaume Meurice de l'émission Le grand dimanche soir, et en le convoquant à un entretien préalable à un licenciement "pour faute grave". Quelle faute grave ? Avoir considéré que si la justice elle-même avait, en avril dernier, abandonné les poursuites contre une blague qualifiant Benyamin Netanyahou de "nazi sans prépuce", c'est qu'il était donc libre de la refaire, dont acte. "C'est ma première blague autorisée par la loi française", a-t-il rigolé. Mais pas autorisée par France Inter, apparemment.
Surtout, et cela nous indigne autant, mais concerne plus directement ASI : après plus de 24 heures d'un déferlement raciste inouï ciblant notre collègue Nassira El Moaddem, présentatrice d'Arrêt sur images, harcelée par l'extrême droite pour un tweet dans lequel elle dénonçait le racisme en France, France Inter a fini par daigner réagir. Pas soutenir : réagir, pour se protéger et de désolidariser - car Nassira a travaillé pour France Inter sur un podcast, Parcours de combattants, jusqu'en 2022. Et l'extrême droite et les médias Bolloré y ont vu une occasion en or : taper à la fois sur une journaliste d'origine arabe et sur le service public (même si l'émission est terminée depuis près de deux ans).
Aujourd’hui dans Affaires Sensibles : le “grand remplacement” ou les nouveaux mots de la haine.
C’est un fantasme réfuté par les chiffres mais qui résiste à toute argumentation rationnelle. La population française, supposément blanche et catholique, serait remplacée par une autre, arabe, noire et musulmane. La France serait colonisée par des étrangers faisant disparaître sa population et sa culture. Une guerre ethnique et même un génocide seraient en marche sans que nous ne fassions rien. Ce pourrait être le titre d’un film d’épouvante : en une formule, le “Grand Remplacement” saisit toutes les angoisses identitaires françaises.
Comment expliquer que cette théorie raciste apparue dans les lignes d’un écrivain français du nom de Renaud Camus, prenne dix ans plus tard une place si importante ? Comment l’extrême-droite a-t-elle remporté la bataille des mots ? Et comment les vieilles angoisses de l’extrême-droite française sont-elles réapparues sous un nouveau jour pour finir comme étendard des suprémacistes blancs du monde entier ? Car c’est dans le cerveau de tueurs de masse que cette idée a terminé son chemin. Et c’est en France, dans des cercles intellectuels puis dans l’environnement du Rassemblement National et d’Eric Zemmour, qu’il faut retracer l’itinéraire de cette pensée qui tue.
Mémoire des luttes - Hasard du calendrier : ce 21 février, alors que le résistant antifasciste arménien Missak Manouchian, tué par les nazis, et sa compagne Mélinée sont envoyés au Panthéon par un gouvernement néo-pétainiste en présence de l’extrême droite, cela fait exactement 19 ans que le Front National a commis un assassinat raciste. Avant de subir des représailles.