Encore un budget de guerre sociale. Encore un gouvernement qui piétine les plus fragiles. Et encore cette même comédie : les syndicats supplient, les partis comptent les voix, les éditos progressistes s’indignent à demi-mot. Mais cette fois, quelque chose pourrait échapper à leur contrôle. Un appel en-dehors des organisations, avec un mot d’ordre clair : Boycott, Désobéissance, Solidarité. Et une date : le 10 septembre. Et derrière, un refus massif de jouer le jeu des institutions mortes. Alors forcément, la machine à décrédibiliser ce mouvement s’est déjà mise en route. Selon les gardiens officiels de l’ordre progressiste, cet appel serait confus et relayé par l’extrême-droite. Mais il est temps d’arrêter de se rassurer avec des fictions. Ce système ne tombera pas sous les coups des pétitions, des motions de censure, des élections ou des grèves perlées. Il tombera peut-être sous les coups d’une classe sociale qui a de moins en moins à perdre.
Chaque année, 211 milliards d’euros d’argent public sont versés aux entreprises… souvent sans aucune contrepartie. Pendant qu’on traque les "assistés", qui profite vraiment du système ? Un rapport explosif du Sénat répond.
211 milliards d’euros par an, un des plus gros budget de l’État, impossible de revenir dessus… mais quel service public est-il si gigantesque ? Ces 211 milliards d’euros par an représentent les aides aux entreprises ! C’est le résultat de la commission d’enquête sur les aides publiques aux entreprises au Sénat. Les sénateurs se sont d’abord confrontés à une grosse opacité autour des aides aux entreprises : “la lobbyiste Agnès Verdier-Molinié a avancé au doigt mouillé l’estimation de 28 milliards d’euros, le ministre de l’Économie, Éric Lombard, lançait lui 150 milliards”, raconte l’Humanité.
Au final, elles englobent les aides budgétaires, fiscales, et les exonérations de cotisations patronales. Le groupe CRCE-K au Sénat revendique que les aides soient transparentes et surtout que “l’argent public ne soit pas reversé aux actionnaires”, c’est à dire que les aides servent à l’investissement et aux emplois plutôt qu’à faire fructifier une entreprise déjà rentable, qui ensuite va délocaliser ; on connaît bien le schéma ici. Le groupe CRCE-K propose que les aides soient évaluées pour savoir comment elles sont utilisées. Le problème ce ne sont pas les aides mais à qui et à quoi elles servent, analysent Thomas Porcher et Lisa Lap.
En effet, quand d’un côté l’État tente d’aller chercher quelques milliards sur les chômeurs, retraités, malades ou pauvres ; de l’autre, les grandes entreprises reçoivent de l’argent public sans contrepartie, et se permettent même d’augmenter leurs dividendes ou faire des plans de licenciement. “Ces entreprises n’ont pas besoin de l’argent public”, affirme l’économiste.
Après 1 an et demi où Javier Milei est au pouvoir en Argentine, le leader d’extrême droite ultra libéral a-t-il sauvé le pays comme il le prétendait ? Non, et ce sont les argentins qui en pâtissent. Le Président argentin, admiré par la droite et l’extrême droite française, a un bilan catastrophique.
La police tue :
Entre 1977 et 2022, 861 morts suite à l’action des forces de l’ordre, dont 27 lors d'opérations anti-terroristes, et 80 du fait d'un agent en dehors de son service
Les forces de police et de gendarmerie ont pour mission d’assurer la sécurité des personnes, des biens et des institutions. À ce titre, elles disposent du pouvoir de recourir à la force et d’utiliser leurs armes à feu, dans des circonstances précises. Ce pouvoir, conféré par l’État, occasionne des morts. Qui sont-ils, pourquoi et comment sont-ils tués ? Dans quelles conditions l’action des forces de l’ordre se révèle-t-elle fatale ?
Réprimer c'est faire des choix politiques et c’est aussi une méthode de gouvernement. De la protection de la "chose publique" à la lutte antiterroriste, en passant par la gestion carcérale de la délinquance ordinaire, on retrace ce soir les transmutations de la répression d'État avec la chercheuse Vanessa Codaccioni qui vient de publier "Comment les États répriment" aux éditions Divergences
Nouvelles lois, amendes, éléments de langage médiatiques... Dans un rapport, Amnesty International analyse la stratégie méthodique des autorités françaises pour réprimer les militants écologistes.
La diffusion du rapport parlementaire sur « l’entrisme islamiste » en France et l’influence supposée des Frères musulmans marque une étape supplémentaire dans le développement de discours et d’actes visant la communauté musulmane dans notre pays. Outre de nombreuses fragilités méthodologiques, ce rapport témoigne plus généralement d’une approche complotiste qui présente des parallèles évidents avec la rhétorique antisémite du début du XXème siècle.
Au cœur d’une lutte devenue majeure pour le mouvement écologiste, le chantier de l’A69, un temps suspendu par la justice, pourrait reprendre prochainement. Pour vous aidez à y voir clair dans les rebondissements judiciaires et manœuvres parlementaires de ces derniers jours, Rapports de Force fait le point. Et éclaire les perspectives de mobilisation.
Ce fut une journée de basses manoeuvres à l’Assemblée nationale. Lundi 2 juin, un texte de loi devait être discuté afin de valider les autorisations environnementales liées au projet d’autoroute entre Castres et Toulouse, l’A69, et ainsi relancer un chantier vivement contesté depuis plus de deux ans. Or, le texte a été rejeté par ceux-là même qui l’avaient proposé, afin d’être renvoyé directement en commission mixte paritaire où il a toutes les chances d’être adopté. Une façon de contourner le débat parlementaire, donc de passer en force, estiment les détracteurs du projet.
Jeudi 15 mai, le Sénat a adopté la proposition de loi visant à relancer les travaux de l’autoroute A69, suspendus par la justice. Le vote de plusieurs sénateurs socialistes en faveur de ce texte inquiète et divise la gauche.
« C’est un affront à la représentation parlementaire ! » Christine Arrighi, députée écologiste de la Haute-Garonne, ne décolère pas. Jeudi 15 mai, le Sénat a largement adopté une proposition de loi pour reprendre les travaux de l’A69 et ainsi contourner la décision de justice du tribunal administratif de Toulouse. Et ce, avec les votes de treize sénateurs socialistes, tandis que le reste du groupe s’abstenait, et qu’un seul votait contre.
En février dernier, la justice avait annulé le projet autoroutier, estimant qu’il ne répondait pas à une raison impérative d’intérêt public majeur dans le dossier. L’État a fait appel de cette décision et plusieurs parlementaires du Tarn, dont le sénateur Philippe Folliot et le député Jean Terlier, avaient décidé dans la foulée de surenchérir en proposant un texte au Parlement pour inscrire l’intérêt public de l’A69 directement dans la loi et ainsi contourner la décision du tribunal.
On aurait préféré que ce soit un poisson d’avril : dans une décision rendue ce 1er avril 2025, le Conseil d’État a validé le principe de la censure arbitraire et opaque d’un réseau social. Derrière l’apparente annulation de la décision du Premier ministre de l’époque, Gabriel Attal, de bloquer Tiktok, la plus haute juridiction française offre en réalité le mode d’emploi de la « bonne censure ». Cette décision est inquiétante, tant cette affaire aura montré l’inefficacité du Conseil d’État à être un rempart efficace contre le fascisme montant.
Il devrait commencer à être assez clair, quand des milices défilent dans Paris au cri de « Paris est nazi », et poignardent des militants de gauche, que ce vers quoi nous nous dirigeons mérite d'être appelé « fascisme ». C'est clair, et en même temps pas encore si clair. Tant qu'un concept n'en aura pas été proposé, le fascisme restera une évocation historique intransposable.
Dans cette interview, réalisée pour le podcast Los monstruos andan sueltos, Verónica Gago analyse la portée de ce qu’elle définit comme « restauration patriarcale » et fait référence au processus de masculinisation de la politique : « Des composants politiques alliés continuent à mettre la progression de l’extrême-droite sur le dos des féminismes ».
Alors que l’état d’exception, c’est-à-dire « l’exception au principe de l’État de droit », semble s’imposer comme la réponse « technique » à tous les défis (terrorisme, pandémies, crises de la démocratie représentative,…), Eugénie Mérieau en propose une analyse historique, juridique et géopolitique.
Elle explique tout d’abord que l’état d’exception a pour effet juridique « objectif » de concentrer le pouvoir aux mains de l’exécutif, et comme effet juridique « subjectif » de suspendre les droits et les libertés individuels garantis. S’il a pour « ancêtres antiques et médiévaux » la dictature romaine et les différentes conceptions de l’État de nécessité, il appartient avant tout à la tradition libérale de l’État de droit et naît avec les Lumières. Son ancêtre direct est la loi martiale, d’invention britannique, qui consiste en un triple-transfert, en temps de paix, du pouvoir législatif, exécutif et judiciaire des autorités civiles vers les autorités militaires. Tout comme la dictature romaine s’exerçait en état d’urgence à l’intérieur des frontières de la ville où aucune formation militaire ne pouvait pénétrer armée en temps ordinaire, et en permanence aux frontières de l’empire, la pensée libérale établit une distinction et une coexistence entre différents ordres juridiques, en fonction des territoires et des populations concernées.
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« L’état d’urgence n’est pas une aberration ou anomalie dans une histoire linéaire de progrès vers les droits de l’homme et la démocratie… Il est la condition même de cette histoire, de ce « conte de fée » libéral, qui doit rester caché dans la périphérie, comme on cache les canalisations d’évacuation des eaux usées… sans lesquelles pourtant rien ne fonctionne et tout suinte de façon pestilentielle. » Avec cet exposé extrêmement clair et synthétique, Eugénie Mérieau replace l’état d’urgence, « zone d’ombre de la pensée libérale », au centre de la théorie et de la pratique du droit libéral : « L’état d’urgence produit de l’exclusion pour mieux pouvoir clamer l’universalisme de l’État de droit. »
Quand Mediapart a révélé l’affaire libyenne en 2011, personne n’y croyait. Quatorze ans et quelque 160 articles plus tard, certains doutent encore, tant les faits défient le sens commun.
« Si c’était une série, on dirait que le scénario est invraisemblable », plaide déjà Nicolas Sarkozy. Pourtant, après une enquête minutieuse, la justice a renvoyé l’ancien président, trois de ses anciens ministres et neuf autres prévenus devant le tribunal. Le procès, historique, suivi par des médias du monde entier, se tient du 6 janvier au 10 avril 2025.
Vous retrouverez ici les comptes-rendus, écrits et vidéos, vous permettant de suivre au jour le jour le procès avec les journalistes qui ont révélé et chroniqué l’affaire. Ainsi que les repères chronologiques, anecdotes, phrases-cultes, documents clés et biographies des principaux protagonistes de cette histoire : peut-être la plus folle et la plus grave qu’ait connu la Vᵉ République.
"Si nous le considérons assez basiquement comme un ensemble de règles communes régissant la vie en société et auxquelles chacun accepte de se plier pour ne pas nuire à son entourage, le droit, ici comme ailleurs, en France comme partout dans le monde, nous protège individuellement et collectivement et nous aide à vivre ensemble, à condition évidemment qu'il soit le même pour tous et qu'il soit équitablement appliqué."
Nouvel épisode de Quelle époque formidable, par Sébastien Fontenelle.
L’ultra-libéralisme produit une dépolitisation en masse. La philosophe Caëla Gillespie fait paraître aux éditions du Bord de l’eau Manufacture de l’homme apolitique, un ouvrage dans lequel elle décortique les ressorts de l’impuissance collective, et tout le vocabulaire qui y conduit, pour mieux retrouver des chemins de l’action.
Le gouvernement a finalement choisi de ne pas renouveler l’agrément de l’association Anticor. Une décision qu’elle va sans doute contester devant le juge administratif. Mais pourquoi l’association anticorruption a-t-elle perdu ce sésame qui lui permettait d’agir en justice en cas d’inaction du parquet ? Mystère. Où l’on comprend qu’il est urgent de réformer les modalités d’octroi de cet agrément.
Répression des militant·es devant le siège d'Amundi : les ONG déposent plainte à l'ONU et dénoncent une dérive autoritaire qui présage du pire avec l'extrême droite aux portes du pouvoir.
En date du 20 juin 2024, Extinction Rebellion France (XR), BLOOM, Greenpeace France, Action Justice Climat Paris (ex Alternatiba Paris), Scientifiques en Rébellion et Attac France, avec le soutien des Amis de la Terre France, GreenFaith et 350.org, ont saisi Michel Forst, le Rapporteur spécial de l’ONU sur les défenseur·es de l’environnement, d’une plainte pour dénoncer la répression grave et disproportionnée subie par les militantes et militants ayant participé à la mobilisation du 24 mai devant le siège d’Amundi.
Ces faits ont également fait l’objet d’une saisine de la Défenseure des droits, et plusieurs militant·es ont déposé un signalement auprès de l’Inspection Générale de la Police Nationale (IGPN).
Dans un contexte d’instabilité politique et de percée inédite de l’extrême droite, dont l’arrivée au pouvoir menacerait d’autant plus nos libertés, les organisations dénoncent une dérive autoritaire du gouvernement. Elles rappellent que la désobéissance civile pacifique est un droit protégé au titre du droit international des droits humains et que la répression par l’État « constitue une menace majeure pour la démocratie » selon Michel Forst, qui a également déclaré récemment que « la France est le pire pays d’Europe concernant la répression policière des militants environnementaux ».