Cinquante ans ont passé depuis le coup d’État du 11 septembre 1973. Les images de la Moneda en flammes, le palais présidentiel, les regards terrorisés des prisonnières et prisonniers du stade national à Santiago ou encore les sinistres lunettes noires du général Pinochet restent imprimées dans nos rétines et nos mémoires collectives. Le peuple chilien, ses luttes et résistances, ont été dans les cœurs et les mobilisations de nombre de collectifs de solidarité de par le monde. Aujourd’hui, ces mémoires de la répression, de l’exil, du combat pour la défense des droits humains, continuent à marquer nos représentations de ce pays du Cône sud. Mais le Chili n’a pas seulement vécu une tragédie : le début des années 1970 est d’abord celui d’un processus populaire et (pré)révolutionnaire extraordinaire qui a fait trembler l’ordre établi. Ce dossier de Contretemps revient au travers de divers articles, entretiens et formats sur ces milles jours qui continuent à interpeller le monde et les réflexions stratégiques des gauches radicales.
«Quand vous regardiez les chiffres du Chili, il semblait impossible que le système s’effondre […], mais soudain, il s’est effondré. Et il s’est effondré parce que, fondamentalement, ils n’ont pas livré la bataille culturelle.» Cette affirmation confuse de Javier Milei est curieuse, non pas tant parce qu’un président «libertarien» revendique la dictature d’Augusto Pinochet – plusieurs ultralibéraux de l’époque l’ont également appuyée –, mais parce que le pinochetisme a bel et bien mené une bataille culturelle qui a même transcendé son propre régime. Mais au-delà des précisions historiques, ce que révèle la phrase du président argentin, c’est son obsession – et celle des nouvelles droites radicales – pour la bataille culturelle; une contre-révolution à la Viktor Orbán en Hongrie, aujourd’hui admirée pour son combat anti-woke.